Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/172

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ceptes d’une langue qu’il n’a point créée et peut la parler en toute sûreté. Pourtant, lorsque l’auteur d’Une Saison en Enfer émet ceci, qu’après avoir inventé la couleur des voyelles il doit trouver des rythmes instinctifs où seront réglés la forme et le mouvement des consonnes, est-ce qu’il ne donne pas la théorie totale du vers libre ? Rendons à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu.


Mais, en 1872, les temps n’étaient pas venus d’admettre ce nouvel art poétique. On était trop près de Leconte de Lisle et de Théodore de Banville. Personne n’aurait osé épouser, en leur audace entière, les doctrines de Rimbaud. Il a fallu que passassent sur leur éclosion trois lustres, durant lesquels elles dormirent dans les limbes de l’inédit et le silence des hommes de lettres, pour qu’une nouvelle génération de poètes s’en éprît et les fécondât.

Verlaine lui-même, bien que séduit, était encore trop possédé par la technique parnassienne. II s’était servi de cette méthode poétique avec une grande adresse, et en avait obtenu des résultats fort appréciés. Certes, au fond, il était d’avis de chercher du nouveau. Néanmoins, les succès d’estime remportés par les Fêtes ga-