Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/45

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
JEAN-ARTHUR RIMBAUD


CHARLES D’ORLÉANS À LOUIS XI

Sire, le temps a laissé son manteau de pluie ; les fourriers d’été sont venus donnons l’huis au visage à Mérencolie ! Vivent les lais et ballades, moralités et joyeusetés Que les clercs de la Basoche nous montrent les folles soties ; allons ouïr la moralité du Bien-Avisé et du Mal-Avisé, et la conversion du clerc Théophilus, et comme allèrent à Rome Saint-Pierre et Saint-Paul et comment y furent martyrés ! Vivent les dames à rebrassés collets, portant atours et broderies N’est-ce pas, Sire, qu’il fait bon dire sous les arbres, quand les cieux sont vêtus de bleu, quand le soleil clair luit, les doux rondeaux, les ballades haut et clair chantées ? J’ai un arbre de la plante d’amour, où une fois me dites oui, ma dame ou riche amoureux a toujours l’avantage… Mais me voilà bien esbaudi, Sire, et vous allez l’être comme moi maître François Villon, le bon folâtre, le gentil raillard qui rima tout cela, engrillonné, nourri d’une miche et d’eau, pleure et se lamente maintenant au fond du Châtelet. Pendu serez lui a-t-on dit devant notaire, et le pauvre follet tout transi a fait son épitaphe pour lui et ses compagnons, et les gracieux gallants dont vous aimez tant les rimes s’attendent danser à Montfaucon, plus becquetés d’oiseaux que dés à coudre, dans la bruine et le soleil !

Oh ! Sire, ce n’est par folle plaisance qu’est là Villon. Pauvres housseurs ont assez de peine. Cler-