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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

gnons, pauvres piteux, accrocheront un nouveau chapelet de pendus aux bras de la forêt ; le vent leur fera chandeaux dans le doux feuillage sonore. Et vous, Sire, comme tous ceux qui aiment le poète, ne pourrez rire qu’en pleurs en lisant ses joyeuses ballades et songerez qu’on a laissé mourir le gentil clerc qui chantait si follement, et ne pourrez chasser Mérencolie !

Pippeur, larron, maître François est pourtant le meilleur fils du monde. Il rit des grasses soupes jacobines, mais il honore ce qu’a honoré l’église de Dieu et Madame la Vierge et la Très Sainte Trinité ! Il honore la Cour du Parlement, mère des bons et sœur des benoîts anges ! Aux médisants du royaume de France, il veut presque autant de mal qu’aux taverniers qui brouillent le vin ! Et dea ! Il sait bien qu’il a trop gallé au temps de sa jeunesse folle. L’hiver, les soirs de famine, auprès de la fontaine Maubuayou dans quelque piscine ruinée, assis à croppetons devant un petit feu de chenevottes, qui flambe par instants pour rougir sa face maigre, il songe qu’il aurait maison et couche molle, s’il eût étudié… Souvent, noir et flou comme chevaucheur d’escovettes, il regarde dans les logis par des mortaises : « Ô ces morceaux savoureux et friands, ces tartes, ces flans, ces grasses gelines dorées ! Je suis plus affamé que Tantalus ! Du rôt ! du rôt ! Oh ! cela sent plus doux qu’ambre et civette !… Du vin de Beaune dans de grandes aiguières d’argent ! Haro, la gorge m’ard !… Ô, si en jeunesse eusse estudié !… Et mes