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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

chausses qui tirent la langue, et ma hucque qui ouvre toutes ses fenêtres, et mon feutre en dents de scie !… Si je rencontrais un pitoyable Alexander pour que je puisse, bien recueilli, bien débouté, chanter à mon aise comme Orpheus, le doux ménétrier ! Si je pouvais vivre en honneur une fois avant que de mourir !… » Mais voilà, souper de rondels, d’effets de lune sur les vieux toits, d’effets de lanternes sur le sol, c’est très maigre, très maigre ; puis passent, en justes cottes, les mignottes villotières qui font chosettes mignardes pour attirer les passants ; puis le regret des tavernes flamboyantes, pleines du cri des buveurs heurtant les pots d’étain et souvent les flamberges, du ricanement des ribaudes et du chant âpre des rebecs mendiants ; le regret des vieilles ruelles noires où saillent follement, pour s’embrasser, des étages de maisons et des poutres énormes, où, dans la nuit épaisse, passent, avec des sons de rapières traînées, des rires et des braieries abominables… Et l’oiseau rentre au vieux nid : tout aux tavernes et aux filles !…

Oh ! Sire, ne pouvoir mettre plumail au vent par ce temps de joie ! La corde est bien triste en mai, quand tout chante, quand tout rit, quand le soleil rayonne sur les murs les plus lépreux !

Pendus seront, pour une franche repue ! Villon est aux mains de la Cour du Parlement : le corbel n’écoutera pas le petit oiseau ! Sire, ce serait vraiment méfait de pendre ces gentils clercs. Ces poètes-là, voyez-vous, ne sont pas d’ici-bas ; laissez-les vivre leur