Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
64
JEAN-ARTHUR RIMBAUD

enfants dans la prairie séparant alors Mézières de Charleville, et où chacun, sous la surveillance maternelle, s’ébattait selon son goût. Les garçons, ordinairement, profitaient de la présence de barques amarrées au bord de la Meuse pour se livrer ensemble à une navigation n’allant pas plus loin que le bout de l’amarre. À moins que, en l’absence de son frère, Arthur ne préférât s’étendre sur le fond d’une de ces petites nefs ballotantes, pour y faire quelque lecture ou pour s’y plonger dans une longue rêverie.

Du quai de Madeleine, où l’on sait que la famille demeurait à présent, quand on avait franchi Charleville et atteint le viaduc séparant les deux cités, on accédait à la prairie par une ouverture ménagée à l’extrémité de la balustrade de ce viaduc, au point de sa jonction avec le pont-levis rabattu sur le fossé des fortifications de Mézières, et après avoir suivi, le long du fossé, un glacis herbeux planté de peupliers.

Arrivés dans la prairie, on jouissait, à gauche, de la vue des ouvrages assez formidables de Vauban. En face, c’était la rivière à droite, la prairie s’étendant vers Warcq. Derrière soi, on avait le viaduc construit sur un pré et, au loin, fermant l’horizon, trouée par le tunnel du chemin