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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

À Charleville, où il arriva presque nu, de nuit, et atteint d’une grosse bronchite, on le trouve, après cette seconde tentative malheureuse vers Paris, dans un état d’inquiète exaspération. Sa mère, effarée, l’a rhabillé et soigné. Il n’en est pas moins sombre et comme honteux de son insuccès. Toutefois, en même temps que ses lectures, il reprend ses interminables promenades dans l’Ardenne ; et, héros malchanceux, à Ernest Delahaye, qui l’admire affectueusement, il confie ses déboires et sa misère.

Puis, le collège rouvre ses portes. Madame Rimbaud voudrait que son fils terminât ses études. Il s’y refuse absolument. Il préférerait vivre en ermite, au creux d’un rocher.

Non loin de Mézières, il y avait un petit bois couvrant l’ancienne exploitation d’une carrière. Après avoir suivi un sentier serpentant à travers un sol tourmenté, on trouvait dans un taillis, sur le flanc de la colline qui porte Saint-Laurent et Romery, une excavation due sans doute à un coup de mine et qui descendait en entonnoir dans la roche jusqu’à une assez grande profondeur. C’est dans cette sorte de grotte, nous a raconté M. Delahaye, que Rimbaud et lui allaient le plus souvent ensemble pour causer et fumer des pipes. Une fois, le jeune poète manifeste à son ami le désir de venir se terrer