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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

là il voulait ainsi se libérer des instances maternelles se multipliant pour qu’il reprît ses études ; et il demande à Delahaye de vouloir bien, au cas où se réaliserait ce projet d’ermitage, lui apporter, chaque jour, simplement un morceau de pain. Les choses en restèrent là.

On ne sait quelle force subconsciente le pousse, en même temps, etle poussera toujours, à s’en aller. S’il stagne encore dans les Ardennes, ce n’est que pour fort peu de jours. On croirait qu’il a pris goût à la vie d’aventures, malgré les souffrances que cette vie lui a déjà fait endurer ; on croirait qu’il recherche le malheur, qu’il veut l’opprobre


Encore tout enfant, j’admirais le forçat intraitable sur qui se referme toujours le bagne je visitais les auberges et les garnis qu’il aurait sacrés par son séjour ; je voyais avec son idée le ciel bleu et le travail fleuri de la campagne ; je flairais sa fatalité dans les villes. Il avait plus de force qu’un saint, plus de bon sens qu’un voyageur — et lui, lui seul ! pour témoin de sa gloire et de sa raison[1] !


C’est pourquoi, en attendant la possibilité d’un nouveau départ, il veut la solitude et le silence. Son rire, au contact des morales qui l’en-

  1. Une Saison en Enfer.