lonide avaient resserré le dilemme entre les griffes duquel se débattait l’opinion. De violents débats s’engageaient parmi la foule. Orthon courait d’un groupe à l’autre, excitant le zèle des partisans de Carthage, cherchant à convertir en prosélytes ceux qui restaient encore indécis. Mais il n’était pas toujours bien reçu. Le prestige indéfectible de Rome, son appui contre l’ingérence africaine, c’était là pour beaucoup — pour l’élite des délicats qui s’obstinaient à appeler les Africains des « Barbares » — c’était là de quoi faire pencher la balance de l’autre côté. Les noms de Marcellus et d’Annibal cinglaient l’air, résonnaient comme des fanfares, semblaient deux épées qui s’entre-croisaient au-dessus des milliers de têtes. Et les gestes menaçants et passionnés ponctuaient les paroles. Des pugilats s’esquissaient de proche à proche. Des horions furent échangés. Et dès lors la mêlée devint générale.
On se battait, ou se battait sur l’immense place publique de Syracuse ; on se battait avec une ardeur sauvage, sans ordre, sans discernement, sans souci de savoir où tombaient les coups. Du sang jaillissait des faces convulsées ; du sang fusait à travers les poings fermés, à travers les bouches ouvertes ; le bruit des membres cognés, le heurt des épaules furieuses remplaçaient l’harmonie des paroles, tout à l’heure distinctes. Sous