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37. Berthollet à Berzelius.
4 septembre 1820.

Monsieur,

Je suis étonné d’être resté si longtemps sans répondre à votre dernière lettre. Je la communiquai à M. Gay-Lussac, qui, comme vous l’aurez vu, en a fait usage dans les Annales, en attendant qu’il eût reçu le mémoire que vous promettiez de lui envoyer.

Pendant l’hiver dernier ma santé a été très mauvaise : j’ai eu un catarrhe violent et avec la forme d’une coqueluche dont je n’ai été quitte qu’au milieu de l’été ; mais à présent je jouis d’une santé peut-être meilleure qu’elle n’a été depuis quelques années.

Au commencement du printemps j’ai éprouvé une perte à laquelle j’ai été bien sensible. Le chevalier Blagden98 qui était venu à Arcueil dans le dessein d’y passer l’été et probablement d’en faire son séjour ordinaire, a été surpris d’une attaque d’apoplexie après avoir dîné avec l’apparence de la meilleure santé, et dans quelques heures il a fini son honorable vie.

Dès la fin de l’année dernière je me flattais de pouvoir reprendre les occupations chimiques et je pris auprès de moi un frère de M. Berard de Montpellier qui a passé plusieurs années avec moi ; mais j’ai eu le chagrin d’éprouver que j’étais tombé dans une impuissance absolue de suivre des recherches. Il faut donc que je renonce aux travaux qui ont fait le plus grand bonheur de ma vie. Cette impuissance est l’accident le plus fâcheux de ma vieillesse ; mais il me restera encore la consolation de pouvoir profiter de vos travaux et de ceux des chimistes qui, avec vous, font faire de si grands progrès à la science que j’ai vue sortir du berceau.

Ainsi je viens de suivre avec un grand intérêt le mémoire de M. Mitscherlich99, qui me paraît établir enfin le véritable rapport qui se trouve entre les formes cristallines et la nature des composés chimiques ; ce qui affermit ma con-