Page:Bibesco - La Question du vers français, 1896, éd3.djvu/12

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ou du Phylloxéra, Question de la Protection ou du Libre-Échange, Question des Armées Permanentes et des Milices, Question de l’Académie Française ou Question du Latin : autant de problèmes, les uns contingents, les autres nécessaires, qui viennent tantôt diversifier, enrichir, orner, agrémenter, déranger la trame des connaissances, tantôt enrayer ou compromettre le cours des événements. Ce siècle est questionneur à rendre des points au fameux interrogant Bailli de Voltaire. Le caricaturiste qui voudra le symboliser imaginera, je suppose, un individu effaré, les poches bondées de livres et d’appareils perfectionnés, courant à perte de vue, haletant, l’œil au vent, et braquant sur ses narines un pince-nez colossal, ourlé sur chaque aile du nez, en point d’interrogation. L’esprit critique est comme la langue : bon ou mauvais à l’extrême. L’hypercriticisme, jaloux de la critique saine qui scrute et féconde, fouille à son tour, pour le plaisir unique d’embrouiller, ébranler et détruire. Après la Physique, après la Politique, après la Pédagogie, après l’Économie politique, il a fallu que la Grammaire, la Prosodie, la Métrique eussent leur tour. La vieille orthographe, le vieil alexandrin sont tenus pour suspects, voire pour prévenus, voire pour coupables. Traduits à la barre, sévèrement interrogés, ils s’entendent traiter d’êtres incapables, arriérés, de culottes-de-peau, de réactionnaires. Ils représentent des institutions surannées, vivant uniquement sur le passé. Leur faire l’honneur de la prison ou de la maison de correction, à ces fossiles ? Y pensez-vous ? Bons tout au plus pour le bocal ou le perchoir : on les plonge dans l’alcool ou on les empaille.

Beaucoup de ces Questions ne seront jamais tranchées que