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fois pour les communes flamandes. Il se rendit l’année suivante à Amiens, lors de l’hommage d’Edouard III au roi de France et s’interposa comme arbitre entre les deux princes. Il réussit moins lorsqu’il s’efforça de réconcilier Robert d’Artois avec Philippe de Valois et de calmer le ressentiment de ce monarque contre le duc de Brabant.

Jean de Beaumont, repoussé dans ses prières et dans ses conseils par Philippe de Valois, seconda la mission des ambassadeurs anglais, qui étaient venus dans le Hainaut pour former une ligue, dont le but était de faire monter Édouard III sur le trône de France. Lorsque, au mois de juillet 1338, Édouard III débarqua à Anvers, Jean de Beaumont fut le premier à venir le saluer, « ce dont li rois, dit Froissart, li sceut grant gré, car par li et son consel en partie il se voloit ordonner… Messires Jehans de Hainnau estoit tousjours dalés le roi et de son conseil. » La guerre ayant commencé, Jean de Beaumont prit part au siége de Cambrai, à l’attaque d’Oisy et d’Honnecourt, à la prise de Guise. La comtesse de Blois, fille de Jean de Beaumont, se trouvait dans ce château. Elle vint supplier son père de ne pas y porter la flamme. « Cela, disait-elle, poés-vous bien faire pour l’amour de moi qui sui vostre fille. — Et pour ce que tu es ma fille, repartit le seigneur de Beaumont, sera ceste ville arse, et remonte là sus au dongeon que la fumière ne te face mal. » Le chroniqueur explique ailleurs cette conduite en exprimant cette pensée généralement admise au moyen âge « qu’il ne s’en pooit excuser, car il li convenoit servir le roi d’Engleterre puisqui’il prendoit ses deniers. »

Jean de Beaumont ne montra pas moins de zèle au siége de Tournai, car il ne pouvait oublier la dévastation du Hainaut par le duc de Normandie. Il assaillit Mortagne et s’empara de Saint-Amand, et l’armée française ne put mettre obstacle à ses audacieuses chevauchées.

En 1340, pendant le voyage du comte de Hainaut en Angleterre, le sire de Beaumont reçut le gouvernement de ce pays ; en 1343, il fut de nouveau désigné pour le diriger pendant l’absence du comte qui voulait aller combattre les Sarrasins de Grenade. Il fit un voyage en Angleterre, pour assister à une grande joute qui eut lieu à Londres, mais il ne fut pas présent à celle qui fut donnée à Windsor, lors de la création de l’ordre de la Jarretière. Il allait pour la première fois connaître l’inconstance de la fortune. Le comte Guillaume de Hainaut périt, en 1345, dans un combat contre les Frisons, pour ne pas avoir écouté les sages avis de son oncle, et celui-ci, désespéré de n’avoir pu le sauver ni le secourir, voulait se jeter au milieu des ennemis pour partager son sort. Il fallut que ses serviteurs l’enlevassent par force et le portassent à bord de son navire, au milieu des traits qui semaient la mort autour de lui.

Jean de Beaumont recevait depuis près de vingt ans une pension importante du roi d’Angleterre quand, par la médiation de son gendre, le comte de Blois, il accepta de Philippe de Valois des dons non moins généreux et renonça à l’hommage d’Édouard III. Le moment de servir une nouvelle cause ne tarda pas à arriver. Jean de Beaumont rejoignit l’armée française qui avait à repousser le roi d’Angleterre débarqué à la Hogue. Peu s’en fallut qu’il n’empêchât à la Blanque-Taque les Anglais de traverser la Somme, et à la journée de Crécy, où il retrouva son vieux compagnon, le roi de Bohème, il eut l’honneur d’être placé « au frein du roi de France. » On sait qu’après une sanglante et confuse mêlée il fut réduit à entraîner hors du champ de bataille le monarque qui, d’une armée si nombreuse, conservait à peine pour le défendre cinq barons qui se réfugièrent avec lui au château de la Broie. Jean de Beaumont était aussi avec Philippe de Valois, quand il s’avança vainement jusqu’à Sandgate pour faire lever le siége de Calais. Le roi Jean, quelques années plus tard, échoua également sous les murs de Calais, dans sa tentative de forcer les Anglais à livrer bataille. Ce fut la dernière fois que Jean de Beaumont « li gentils chevaliers » porta les armes, car il mourut à Valenciennes, le 11 mars 1356, et fut enseveli en grande solennité dans le