Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment dont la face était protégée par une haute et solide muraille et dont les deux côtés étaient défendus par le cours torrentueux du Lech et par le lit déjà passablement large du Danube. Soit que l’on ne se trouvât pas en forces suffisantes pour entreprendre l’attaque de cette espèce de camp retranché, soit que la saison fût trop avancée pour qu’on pût espérer d’y pénétrer avant les grandes rigueurs de l’hiver, les deux maires reprirent le chemin de la France. Mais, l’année suivante (743), ils repartissent devant le camp d’Odilon. Pendant quinze jours, l’assiégé, se tenant prudemment enfermé dans sa forteresse, insulte et défie les haches et les lances franques. Toutefois il ne juge pas inutile l’intervention d’un prêtre romain Sergius, envoyé par le pape Zacharie pour engager les assaillants à se retirer, sous peine d’encourir la colère de saint Pierre. Sans se laisser ébranler par cette menace, ils tiennent bon, et, la nuit suivante, ils franchissent le Lech, le Danube et les abords marécageux du retranchement sur des ponts formés de chariots. Ayant pénétré de cette façon dans le camp à la faveur de l’obscurité, ils font un effroyable carnage des Bavarois. Odilon ne réussit qu’à grand’peine à s’échapper avec un petit nombre des siens et à se mettre en sûreté sur la rive droite de l’Inn. Ils ne jugent pas à propos de le suivre jusque-là et se contentent de parcourir la Bavière pendant cinquante-deux jours et de tout saccager. Ils ne cessèrent cette œuvre de destruction qu’à la nouvelle que les Saxons venaient de se soulever à leur tour, et que Hunold d’Aquitaine s’était engagé envers Odilon à opérer de son côté une diversion en envahissant la Neustrie, où, en effet, on ne tarda pas à le voir dévaster tout le pays depuis la Loire jusqu’aux environs de Chartres. Ne pouvant tenir tête à un si grand nombre d’ennemis à la fois, les deux frères se séparent l’un de l’autre. Pendant que Pépin court rejeter les Aquitains hors de la Neustrie, Carloman marche contre les Saxons, les taille en pièces et fait prisonnier leur chef Theuderic qu’il ne relâche qu’après en avoir reçu le serment d’obéissance. Mais ce serment est si mal tenu que, l’année suivante (744), le maire austrasien est forcé de rentrer avec son armée dans la Saxe. Il s’empare de nouveau de Theuderic, mais l’emmène cette fois prisonnier, pendant que Pepin pénètre sur le territoire des Alamans, les disperse, et poursuit leur duc Théobald jusque dans les escarpements des Alpes. La soumission de ce chef et la captivité de Theuderie privaient Odilon de ses plus actifs alliés. Dès lors il se vit obligé de traiter à son tour avec Carloman et de reconnaître derechef l’autorité austrasienne.

Ayant réduit à l’impuissance ces turbulentes populations d’outre-Rhin que plus tard Charlemagne lui-même eut tant de peine à maintenir sous son sceptre, Carloman et Pepin songèrent enfin, en 745, à frapper un grand coup en Aquitaine. Mais, effrayé à l’approche de l’armée formidable qui allait fondre sur lui, Hunold demande à négocier avant même que les Francs aient atteint la Loire, et il jure soumission et fidélité à Carloman et à Pepin ainsi qu’à leurs enfants. Cette courte campagne laissa aux épées franques le temps de faire une troisième apparition parmi les Saxons qui achevèrent de se soumettre et dont un grand nombre embrassèrent volontairement le christianisme.

Cette expédition semblait devoir être la dernière pour consolider l’autorité des deux fils de Charles Martel. Cependant il n’en fut point ainsi. À peine rentré en Austrasie, Carloman eut-il congédié ses leudes, qu’il reçut la nouvelle que le duc des Alamans Théobald franchissait le Rhin et commençait à exercer des déprédations dans l’Alsace. Il en éprouva une violente irritation et résolut d’en finir avec ce turbulent vassal. Dès le printemps de l’année 746, il franchit le Rhin à son tour, s’avança droit vers la Souabe et convoqua les leudes alamans à Canstadt. Ils y parurent tous en armes. Mais il les fit immédiatement cerner par ses Austrasiens et dépouiller de leur harnais de guerre. Après quoi il procéda à une enquête rigoureuse sur la part que Théobald et quelques-uns de ses adhérents avaient prise aux événements qui