Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/332

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tres grands personnages[1]. Guillaume de Clèves s’était flatté d’obtenir de lui l’investiture du duché de Gueldre avec la main de la duchesse douairière de Milan : ses propositions ayant été rejetées, il se tourna vers la France, à laquelle il ne tarda pas à s’allier étroitement. Charles reçut aussi des ambassadeurs du duc de Saxe, du landgrave de Hesse et des autres princes protestants d’Allemagne. Quelque temps avant son départ de Madrid, des conférences avaient eu lieu, à Francfort[2], entre Louis de Bavière, électeur palatin, et Joachim, marquis de Brandebourg, munis de ses pleins pouvoirs, d’une part, et des députés des pays de la confession d’Augsbourg, de l’autre : il y avait été convenu[3] que l’empereur accorderait aux protestants une trève de quinze mois; que l’accord de Nuremberg; et l’édit de Ratisbonne demeureraient dans leur force et vigueur; que si, durant la trève, on ne pouvait s’accommoder sur le fait de la religion, la paix n’en subsisterait pas moins entre les protestants et les catholiques jusqu’à la prochaine diète générale; que toutes procédures intentées contre les premiers devant la chambre impériale seraient suspendues; que les protestants ne recevraient aucun prince, État ni ville dans leur confédération, et que, de part et d’autre, on s’abstiendrait de tout appareil de guerre; enfin que, sous le bon plaisir de l’empereur, une journée, à laquelle on n’appellerait point de légat du pape, serait assignée, à Nuremberg, entre les catholiques et les protestants pour le règlement des affaires de la religion. Paul III, informé de cette convention, avait dépêché sur-le-champ à l’empereur pour qu’il ne la ratifiât point, la regardant comme attentatoire à l’autorité du saint-siége. Charles, qui ne voulait mécontenter ni le pape ni les protestants, avait évité de se prononcer. C’était afin de le faire sortir de son indécision, d’obtenir de lui l’approbation de la trève de Francfort et conséquemment la convocation, soit d’une diète impériale, soit d’une assemblée particulière des princes et états de l’Empire, que le landgrave, l’électeur de Saxe et leurs adhérents venaient de lui envoyer des ambassadeurs. Ceux-ci montraient les dispositions les plus conciliantes; ils se déclaraient prêts à tout sacrifier pour la justice; l’agent du landgrave allait jusqu’à protester au seigneur de Gravelle que son maître avait un grand désir de faire service à l’empereur[4]. Charles leur répondit que, d’accord avec le roi son frère, il ne négligerait aucun des moyens propres à rétablir la concorde et la paix dans la Germanie. Comme ils le suppliaient de mettre un terme aux procédures qui étaient intentées contre eux devant la chambre impériale, il leur donna l’assurance qu’aucune nouveauté ne serait faite à leur préjudice, à condition qu’ils s’abstinssent eux-mêmes de toute innovation[5]. Lorsqu’il eut pris l’avis de Ferdinand, il annonça aux princes qui les avaient nommés, qu’une diète se tiendrait, au mois de juin, à Spire ou dans quelque autre ville d’Allemagne qui serait jugée plus convenable. Ce fut à Haguenau qu’elle se réunit.

A la suite de l’entrevue d’ Aigues-Mortes, des négociations en vue d’alliances matrimoniales avaient été entamées entre les cours de France et d’Espagne. Par un écrit délivré, le 22 décembre 1538, à l’évêque de Tarbes et au Sr de Brissac, ambassadeurs de François Ier[6], Charles avait promis de ne traiter du mariage du prince son fils qu’avec madame Marguerite, fille du roi, et de donner sa fille aînée ou la seconde fille du roi des Romains au duc d’Orléans. Ce dernier mariage se serait accompli quand les parties auraient eu l’âge compétent; alors l’empereur aurait disposé du duché de Milan en faveur des époux; en même temps tous les différends qu’il y aurait eu encore entre lui et le roi se seraient vidés, et l’on aurait recherché les moyens d’assoupir ceux qui auraient subsisté entre le

  1. Relation des troubles de Gand, pp. 68-71. — Journal manuscrit du sieur de Herbais.
  2. En février, mars et avril 1539.
  3. Le 19 avril.
  4. Ribier, t. I, p. 507.
  5. Ribier, t. I, p. 506.
  6. L’Empereur ratifia cet écrit par un acte en date du 1er fév. 1539 qui est dans Ribier, t. I, p.365.