Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 3.djvu/364

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tendre ni sa justification ni ses excuses : il lui déclare qu’il doit rétablir dans son électorat l’ancienne religion telle qu’elle y a toujours été observée, et destituer les apostats et les prêcheurs appelés par lui; que s’il ne le fait pas, le pape procédera contre sa personne, et qu’il pourra perdre en même temps et sa dignité épiscopale et celle de prince de l’Empire, car, pour sa part, il est bien décidé à ne plus tolérer ses excès. Il prend les chanoines sous sa protection, leur enjoignant de procéder en toute rigueur contre ceux qui oseraient se soustraire à l’autorité de l’église romaine[1]. Le 20 août Charles arrive à Louvain, où il est reçu par la reine Marie. De Louvain il va avec la reine au château de Tervueren attendre que les préparatifs des obsèques de la princesse d’Espagne soient terminés. Cette cérémonie a lieu le 26 et le 27 août à Sainte-Gudule; il y assiste avec l’archiduc Maximilien, le prince de Piémont Emmanuel-Philibert et tous les seigneurs de sa cour. Il avait mandé à Bruxelles des députés des provinces; il ne les réunit pas cette fois en états généraux, comme il en avait l’habitude, il leur en dit la raison : c’est « qu’il leur veut faire entendre aucuns secrets du pays qu’il n’est besoin que chacun sache, et qu’en l’assemblée générale plusieurs se fourrent qui ne sont appelés. » Il reçoit donc, l’une après l’autre, dans les journées du 30 et du 31 août, les différentes députations. Il leur remet en mémoire les dangers que les Pays-Bas ont courus au commencement de la guerre passée, s’étant trouvés désarmés lorsqu’ils ont été soudainement envahis. Il leur remontre que, ne pouvant continuellement demeurer dans ces provinces, à cause des affaires de ses autres royaumes, il souhaiterait, avant son départ, pourvoir à leur sûreté de manière qu’ils n’eussent rien à craindre pendant son absence. Il leur dit qu’il a consulté, sur les mesures à prendre, afin d’atteindre ce but, les chevaliers de la Toison d’or ainsi que les principaux seigneurs du pays, et c’est après les avoir entendus qu’il s’est déterminé à demander aux états l’aide nécessaire pour l’entretien de trois mille chevaux qui seront toujours prêts à se porter partout où il en sera besoin[2]. Cette proposition est accueillie avec faveur par les députés; toutes les provinces, sur le rapport de ceux-ci, votent successivement l’aide demandée.

Le retour de Charles-Quint à Bruxelles était regardé par tous les hommes politiques comme le moment où la déclaration de ce monarque sur l’alternative stipulée dans le traité de Crépy devait sortir ses effets. Le duc d’Orléans l’attendait avec impatience; afin d’être libre à ce moment-là, il n’avait pas accepté le commandement de l’armée levée par le roi son père pour reprendre Boulogne. Tout à coup on apprend que ce jeune prince est mort le 9 septembre après quelques jours de maladie, emporté par une pleurésie suivant les uns, par la peste suivant les autres. À cette nouvelle, Charles envoie complimenter les sieurs de Grignan et Mesnage, qui étaient accrédités auprès de lui par le roi très-chrétien, et les assurer de son intention de maintenir la paix conclue l’année précédente. Il fait partir Philippe de Lannoy, seigneur de Molembais, chevalier de la Toison d’or, pour la cour de France, avec la mission d’exprimer au roi et à la famille royale la part qu’il prend au coup qui les a frappés. En même temps il transmet à son ambassadeur à cette cour, le sieur de Saint-Mauris, des instructions sur la conduite qu’il aura désormais à tenir. Il lui recommande de ne plus s’occuper de questions dépendantes du traité de Crépy; de parler de ce traité le moins possible; de répondre au roi et à ses ministres, s’ils lui en parlent, que la volonté de lui, empereur, est de remplir toutes ses obligations, et qu’il ne désire rien autant que de vivre en bonne amitié avec le roi son beau-frère. Il le charge enfin de mettre sur le tapis, comme pouvant servir de base à une nouvelle convention, le mariage du prince d’Espagne avec madame Marguerite, deuxième sœur du dauphin. Le 25 et le 26 septembre il fait célé-

  1. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 98.
  2. Recueil manuscrit des propositions faites aux états généraux.