Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/102

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avaient lâchement outragée. M. Laffitte lut cette lettre d’une voix profonde, tandis que, levant les mains au ciel, les députés de son parti criaient : Quelle horreur ! Manuel parut à son tour, et, appuyé contre le marbre de la tribune, malade, le visage couvert de pâleur, il prononça ce mot terrible : Assassins ! Durant plusieurs séances, ce ne furent que récits funèbres faits par les députés de la bourgeoisie. M. Demarçay avait vu des dragons charger une foule inoffensive dans la rue de Rivoli, et deux d’entre eux pousser leurs chevaux jusque dans le passage Delorme. Des peintures non moins émouvantes furent faites par M. Casimir Périer. Et, pendant ce temps, les journaux publiaient le sombre interrogatoire de Louvel, cet homme étrange, qui n’avait frappé un prince que pour éteindre en lui d’un seul coup toute une race de rois, homme à convictions implacables, plus implacables pourtant que son cœur.

Dans l’immense agitation que tout cela faisait naître, les deux partis s’accusèrent réciproquement et avec violence. Tous deux ils avaient raison, dans une certaine mesure. La bourgeoisie avait droit de s’indigner des excès d’une répression sauvage ; mais on pouvait lui reprocher d’avoir été séditieuse elle-même et violente.

Quelques cris de vive l’Empereur avaient été poussés dans les rues : les députés de la gauche prétendirent que ceux qui les avaient poussés étaient des