Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/276

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M. Baude parut à son tour à l’Hôtel-de-Ville pour y jouir des privilèges de l’audace. Il se fit secrétaire d’un gouvernement idéal, il répandit des proclamations. Un avocat, M. Franque, reçut ordre de courir chez le premier président de la cour royale, M. Séguier, de l’arrêter et de le conduire de force à l’Hôtel-de-Ville. On voulait placer l’insurrection sous le patronage apparent des autorités judiciaires. Ainsi les deux hommes qui avaient voulu être le pouvoir pendant quelques heures, furent le pouvoir. On obéissait.

À peine installé, M. Baude prit quelques mesures d’urgence. Il fit faire par M. de Villeneuve l’inventaire de la caisse de l’Hôtel-de-Ville, où l’on trouva un peu plus de cinq millions. Il convoqua les syndics de la boulangerie, qui l’informèrent que Paris était approvisionné de pain pour un mois. Il fit prévenir les syndics de la boucherie que, durant la crise, le bétail entrerait librement à Paris. Enfin, une commission chargée de correspondre avec l’Hôtel-de-Ville, se forma par ses soins dans chacun des douze arrondissements de la capitale.

Au milieu des soucis de cette puissance si hardiment usurpée, M. Baude reçut la visite de M. Claprote, attaché à l’ambassade de Prusse. Il apprit de lui que l’attitude du peuple parisien pendant ces étonnantes journées avait frappé tous les membres du corps diplomatique de stupeur mais en même temps d’admiration ; que leurs dépêches contenaient l’expression de ce double sentiment et rendaient probable le maintien de la paix entre l’Europe monarchique et la France révolutionnaire. La