Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/360

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« Établissement des gardes nationales sur tous les points de la France. La garde de la constitution leur est confiée.

« Les principes pour lesquels nous venons d’exposer notre vie, nous les soutiendrons au besoin par l’insurrection légale. »

Cette proclamation fixe d’une manière très-précise la limite à laquelle s’arrêtaient en 1830 les esprits les plus aventureux, si on excepte pourtant quelques rares disciples de Saint-Simon. Que la religion de l’État fût abolie ; qu’un président fût mis à la place d’un roi ; que le suffrage universel à un degré ou même à deux degrés fût établi ; là venait mourir l’audace des plus bruyants novateurs. Mais la société serait-elle plus heureuse quand le droit de la diriger moralement aurait été enlevé à l’État ? Le renversement de la royauté suffirait-il pour rendre désormais impossible dans les relations civiles la tyrannie du capitaliste sur le travailleur ? Le suffrage universel devait-il être proclamé comme un hommage rendu à un droit métaphysique, ou comme un moyen sûr d’arriver au changement de l’ordre social tout entier ? De telles questions étaient trop hautes pour l’époque, et plus d’une tempête devait éclater avant qu’on songeât à les résoudre. En 1830 on ne songeait pas même à les poser.

Quoi qu’il en soit, les républicains avaient, vis-à-vis d’un peuple en mouvement, cet avantage immense que les choses par eux voulues étaient ce qu’il y avait alors de plus net et de plus nouveau. Mais ils manquaient d’organisation, et surtout de chef. Pour juger de l’impulsion que M. de Lafayette