Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/394

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tilhomme novateur un impatient et vaste désir de réformes. Admis auprès de M. de Lafyette, il lui exposa ses idées qui n’allaient pas à moins qu’à remuer la société dans ses fondements. « L’occasion est belle, disait Bazar à Lafayette, et voici que la fortune vous a livré la toute-puissance. Qui vous arrête ? Soyez le pouvoir, et que par vous la France soit régénérée. » M. de Lafayette écoutait avec un étonnement inexprimable cet homme, plus jeune que lui, mais dont la supériorité intellectuelle le frappait de respect. Jamais d’aussi audacieuses paroles n’avaient retenti à son oreille : jamais on ne l’avait fait descendre par la pensée en de telles profondeurs. Mais il était trop tôt pour une rénovation sociale, et M. de Lafayette, qui en comprenait à peine la nécessité, n’était pas fait pour en courir les hasards. Cet entretien fut la seule tentative vraiment philosophique née de l’ébranlement de juillet : elle dut échouer comme tout ce qui vient avant l’heure.

Le gouvernement de la bourgeoisie était à peu près constitué. Il ne lui restait plus qu’à s’entourer. d’ue popularité factice qui lui permît de résister aux orages d’un premier établissement. Des émissaires sont envoyés dans les quartiers les plus populeux. Ils se mêlent à tous les groupes. Avec cette assurance que donne un commencement de succès et qui impose toujours à la multitude, ils vantent courage du duc d’Orléans, son patriotisme, ses vertus ; et, identifiant à sa cause celle de la révolution elle-même, ils dénoncent comme agents de la dynastie chassée ceux qui osent élever la voix contre