Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/68

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de l’Europe, et la main de leurs ministres ne s’était pas séchée en signant les traités de 1815. — Ils avaient ramené, au sein de la patrie en deuil, des milliers de gentilshommes, race orgueilleuse, et le clergé, caste envahissante. — Ils avaient débuté par des proscriptions, et l’ombre de Michel Ney se dressait contre eux, les accusant d’assassinat. — Ils tenaient le glaive levé sur la tête des acquéreurs de biens nationaux, et leur seule présence était une menace sans fin.

Tous ces griefs, malheur à qui les déclarerait illégitimes ! Mais suffisent-ils pour expliquer historiquement le rôle de la bourgeoisie en 1830 ? J’affirme que non.

Si Louis XVIII osa ramasser sa couronne sur le champ de bataille de Waterloo, cette terre ensanglantée ; s’il rentra dans Paris au milieu d’un état-major anglais, russe et prussien ; s’il ne rougit pas de reconnaître au prince régent d’Angleterre un droit de suzeraineté morale sur l’héritage de Louis XIV et de Napoléon ; si Wellington fut par lui maréchal de France ; si, pendant qu’aux Tuileries il s’essayait à la royauté, le baron de Muffling, un étranger, fut fait gouverneur de sa capitale ; si le Musée fut mis au pillage par les Prussiens ; si Blucher, dans un accès de rage, put parler impunément de faire sauter nos édifices ; si Alexandre fut regardé comme l’ami du roi de France, parce qu’il s’était contenté de faire retentir sous les pas de son armée les ponts