Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 4.djvu/157

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pris pour point de départ de leur politique la conservation de la Turquie, le statu quo oriental ! La postérité croira difficilement à un tel excès d’imprévoyance. Mais le récit des faits subséquents va montrer jusqu’où le gouvernement français sut aller dans cette carrière de fautes et de folies.

Vers la fin de 1831, Méhémet-Ali avait envoyé Ibrahim à Saint-Jean-d’Acre pour en faire le siège. Le pacha d’Acre, Abdallah, était un homme pétri de présomption et de ruse. Révolté contre la Porte et menacé par sa vengeance, il avait accepté auprès d’elle le patronage artificieux du pacha d’Égypte, et s’était lié à sa fortune par des engagements qu’il viola. Mais le ressentiment de Méhémet-Ali n’était que le prétexte de cette guerre. Elle avait une cause plus profonde. Méhémet-Ali convoitait la Syrie, annexe presqu’indispensable de l’Égypte. Il la convoitait pour s’agrandir, et aussi pour se défendre. Car le sultan le redoutait, l’enviait ; et l’homme le plus puissant de l’empire après Mahmoud, Khosrew-Pacha, que Méhémet-Ali avait supplanté en Égypte, brûlait de l’anéantir. En butte à de sourdes machinations et enlacé par l’intrigue, un coup de poignard pouvait avoir raison de sa gloire. Il le savait ; et le sultan, dont il recevait les ordres en s’inclinant jusqu’à terre, il le tenait pour son plus irréconciliable ennemi. Ibrahim arriva donc devant ces murs de Saint-Jean-d’Acre qui, franchis par Napoléon, lui eussent valu la conquète de l’Asie et la domination du globe. Abdallah opposa aux Égyptiens une longue résistance, succomba enfin, et fut traîné captif en Égypte, où Méhémet-Ali, qui n’a-