Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 5.djvu/226

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en plaintes éloquentes sur ce qu’on le livrait désarmé à la fureur des partis. Un tel éclat semblait faire pencher du côté des doctrinaires la faveur royale ils se réjouirent du succès de leur tactique, mais ils n’avaient pas tout prévu.

Entre la majorité par qui Casimir Périer et ses successeurs fidèles avaient été soutenus si violemment et l’Opposition que guidait M. Odilon Barrot, un parti s’était formé dans la Chambre qui mêlait certaines intentions louables à une ambition à la fois impatiente et timide. Dirigé d’abord par MM. Sauzet, Passy, Dufaure, il harcelait sans ménagement l’ancienne majorité, dont il s’était détaché, et néanmoins il n’en diSérait pas d’une manière sensible. Car il se bornait à vouloir qu’on apportât un adoucissement aux lois de septembre ; qu’on accordât un peu plus d’air et d’espace aux opinions extrêmes que la main du roi se fit moins sentir dans les affaires publiques qu’on opposât des mesures d’oubli et de clémence à l’opiniâtreté des ressentiments, fruit de tant de révoltes armées. L’avènement de M. Molé au ministère, le 6 septembre, servit à donner de la vie à cette coalition de froids agitateurs. M. Thiers, qui avait besoin de leur appui pour reconquérir le pouvoir, n’hésita pas à se rapprocher d’eux, se fit leur chef, leur donna un nom, —celui de Centre Gauche,— et leur communiqua ce qu’il y avait en lui d’inquiétude belliqueuse, d’honorables caprices, de disposition enfin à braver par fantaisie l’Europe et le roi. Ainsi conduit, le Centre Gauche avait fini par peser sur les décisions