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INTRODUCTION.

politique et la superstition religieuse, elle a reparu sur les ruines mêlées de la Convention, de l’Empire et de la Restauration. 1830 appartient à cette chaîne dont 1789 fut le premier anneau. 1789 avait commencé la domination de la bourgeoisie ; 1830 l’a continuée.

Voyez, au contraire, la révolution de 1793 ! Combien a-t-elle duré ? qu’en reste-t-il ? Et pourtant, de quelle puissance, de quelle audace, de quel génie n’étaient pas doués ceux qui s’étaient chargés de son triomphe ? Quels efforts gigantesques ! quelle effrayante activité ! que de ressorts mis en jeu, depuis l’enthousiasme jusqu’à la terreur ! que d’instruments usés au service des doctrines nouvelles, depuis l’épée du général d’armée jusqu’au couteau de l’exécuteur ! Mais le but de cette révolution, dont les conventionnels avaient à donner le catéchisme, n’avait pas été défini longtemps à l’avance. Aucune des théories aventurées par Robespierre et Saint-Just n’avait été suffisamment élaborée au sein de la nation. Jean-Jacques avait bien publié le Contrat social ; mais la voix de ce grand homme s’était à demi perdue dans la clameur immense dont les publicistes de la bourgeoisie remplirent le XVIIIe siècle. C’était donc tout un nouveau monde à créer, à créer en quelques jours, à créer au milieu d’un déchaînement inouï de résistances et de colères. Il fallut improviser, demander aux passions l’appui que ne pouvaient pas encore fournir les idées ; il fallut étonner, enflammer, enivrer, dompter les hommes qu’un travail antérieur n’avait pas disposés à se laisser convaincre. De là, des obstacles sans nombre, des malentendus terribles et sanglants, de fraternelles alliances tout à coup dé-