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INTRODUCTION.

temps de s’en occuper quand la révolution politique se trouvera enfin accomplie, nous ne saurions les comprendre. Quoi ! il faut conquérir le pouvoir, sauf à se rendre compte plus tard de ce qu’on en doit faire ! Quoi ! il faut se mettre en route, avant d’avoir fixé le point qu’il s’agit d’atteindre !

On se trompe étrangement, si l’on croit que les révolutions s’improvisent. Les révolutions qui n’avortent pas sont celles dont le but est précis et a été défini d’avance.

Voyez la révolution bourgeoise de 89 ! Quand elle éclata, chacun en aurait pu dresser le programme. Sortie vivante de l’encyclopédie, ce grand laboratoire des idées du XVIIIe siècle, elle n’avait plus, en 1789, qu’à prendre matériellement possession d’un domaine déjà conquis moralement. Et cela est si vrai, que le tiers-état d’alors ne trouvait pas d’inconvénient à se passer de législateurs. Des mandats impératifs ! criait-on de toutes parts. Pourquoi ? Parce que, dans la pensée de tous, le but de la révolution était parfaitement défini. On savait ce qu’on voulait ; pour quelle cause et de quelle manière on le voulait. Ouvrons les fameux cahiers de cette époque : la révolution y est tout entière ; car la constitution de 1791 n’en fut qu’un résumé fidèle. Aussi, comme elle s’est fortement installée, cette révolution de 89, et combien ses racines sont profondément descendues dans la société ! Les orages de la Convention ont eu beau passer sur elle ; l’Empire a eu beau l’éclipser à force de villes prises et de batailles gagnées ; la Restauration a eu beau la combattre par tout ce qu’il y a de plus puissant chez les hommes, la superstition