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DU TRAVAIL.

laissée à l’homme de se développer selon les lois de sa nature. Eh bien ! la liberté, ainsi entendue, existe-t-elle, dans notre ordre social, pour la majorité des citoyens ? La concurrence, nous l’avons déjà prouvé, crée à la société une situation violente qui a pour conséquence inévitable d’imposer aux ouvriers un travail excessif et continu. L’excès et la continuité du travail manuel laissent sans emploi les ressorts de l’intelligence et dépravent la sensibilité. Est-il possible que la vit intellectuelle et le sentiment moral ne s’éteignent pas dans les grossières préoccupations d’un labeur qui dure douze, treize, et quelquefois quatorze heures par jour ? Et quel labeur ! L’extrême division du travail, qui, dans une société bien organisée, serait d’une utilité incontestable pour tous, l’extrême division du travail a engendré l’homme machine.

Donc, si, pour une partie de la société, la concurrence est un aiguillon, elle constitue pou la partie la plus nombreuse un véritable système d’étouffement.

Qu’espèrent ceux qui, ne voulant pas de réforme sociale, s’écrient niaisement : « Il faut instruire le peuple ? » Cela signifie apparemment qu’il faut écrire pour le peuple des livres et des journaux qu’il n’a pas le temps de lire, alors même qu’il aurait de quoi les payer ! cela signifie qu’il faut contraindre le pauvre à envoyer ses