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ORGANISATION

jourd’hui. La condition, il est vrai, deviendrait moins favorable, puisque la librairie sociale ferait une concurrence sérieuse aux éditeurs particuliers. Mais de quels écrivains est-il ici question ? De ceux qui, par l’attrait que leurs livres empruntent soit à la frivolité, soit à la corruption, soit au scandale, font pour ainsi dire violence à la bourse d’un grand nombre de lecteurs, et courent après les gros bénéfices. Or, quand le bénéfice des livres futiles ou dangereux serait diminué au profit des bons livres, où serait le mal ? Est-ce que la société peut souffrir qu’on devienne démesurément riche en la trompant, alors qu’en la servant on est exposé à demeurer pauvre ? Cela est-il équitable ? Et la nation au sein de laquelle se produit ce honteux phénomène, ne penche-t-elle pas du côté des abîmes ? Oui, le système proposé aurait pour résultat inévitable de réduire le nombre et les bénéfices de ceux qui font de la pensée métier et marchandise. Mais ce résultat milite en faveur du système, loin de le combattre.

Nous prévoyons une autre objection. On va nous opposer le danger de rendre l’État arbitre souverain des productions de l’esprit. Mais pour peu qu’on y réfléchisse, on sera tout-à-fait rassuré. L’État, je le répète, serait le législateur de la librairie sociale, il n’en serait pas le directeur. Une fois les statuts rédigés, il en surveillerait l’exécution, comme il surveille l’exécution de la loi qui