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contre les personnes qui auront rédigé ou mis à exécution les nouveaux mandats d’arrêt.

La transportation d’un individu au delà des mers expose les personnes qui l’ordonnent aux peines du prœmunire act, c’est-à-dire aux peines les plus sévères après la peine de mort, sans que les personnes ainsi frappées de ces peines puissent en être relevées par la clémence royale. Les personnes qui ont facilité cette transportation, soit en la mettant à exécution, soit en y prêtant leurs navires, sont également passibles d’une action en dommages-intérêts.

Les défendeurs aux actions en dommages-intérêts peuvent plaider qu’ils ne sont pas coupables, produire à cet effet tous les témoignages spéciaux que bon leur semblera, et le jury peut les acquitter, s’il trouve leurs justifications suffisantes. En pareil cas, les personnes dont le débat indique ou révèle la culpabilité peuvent être mises en cause.

Depuis bientôt deux cents ans que cet acte existe, le gouvernement s’y est toujours soumis, et aucune poursuite criminelle n’a été intentée à aucun fonctionnaire, ni à aucun ministre pour infraction à ses dispositions. Dans quelques rares circonstances, en 1689, en 1745, en 1793, en 1822, époques qui correspondent à des guerres civiles, à de grandes commotions politiques, ou à des troubles parmi les populations industrielles, l’exécution de ce bill a été suspendue pendant quelque temps par une loi. On l’a également suspendue plusieurs fois en Irlande, notamment en 1848, mais cette suspension n’autorise pas l’emprisonnement arbitraire, et le magistrat reste responsable de ses actes ; la suspension de l’habeas corpus act SUSPEND seulement les procédures.

Louis Gottard

Comparez : Détention préventive, État de siège, Liberté individuelle.

HAÏTI. Cette île, une des quatre grandes Antilles, est placée entre les 17° 43’ et 19° 58’ de latitude nord, et les 70° 45’ et 76° 55’ de longitude ouest. Sa longueur est de 600 kilomètres de l’est à l’ouest, et sa largeur varie de 27 à 230 kilomètres du nord au sud.

Haïti fut découverte par Christophe Colomb, le dimanche 6 décembre 1492, deux mois après que la petite île de Guanahani (aujourd’hui San-Salvador) eut la première réalisé le rêve de son génie. Le nom d’Haïti, dans le langage des indigènes, signifiait pays montagneux ; Colomb la nomma Hispaniola ; les Français et les Anglais l’appelèrent Saint-Domingue, du nom de la ville fondée en 1495 par Bartoloméo Colomb, et qui devint la capitale du premier établissement des Espagnols.

Quatre grandes chalnes de montagnes courent de l’est à l’ouest, et de nombreuses rivières en descendent. Le pic du Cibao, élevé de 2,400 mètres au-dessus de la mer, est au centre de la région aurifère qui excita tout d’abord la cupidité des Espagnols. On y trouve aussi du cuivre, du plomb, de l’argent, du mercure, du sel gemme, du soufre et du marbre. L’existence de la houille est signalée en plusieurs endroits. Mais ce n’est pas l’exploitation de ces divers minéraux qui constitue aujourd’hui les ressources d’Haïti. Ses bois de teinture et d’ébénisterie, ses productions des tropiques, le café, le sucre, le cacao, le coton, voilà ses vraies richesses, auxquelles il faut ajouter les bœufs, les porcs et les moutons. À ces avantages se joint celui du climat. Bien que très-chaud, il est tempéré par les vents alizés, des pluies abondantes, et la presque égalité des jours et des nuits. Si le séjour des vallées est un peu malsain, à cause de l’humidité, celui des plateaux est en revanche très-salubre. Les ouragans, des tremblements de terre y causent parfois des ravages ; mais ce sont les seuls fléaux à redouter, car il n’y a pas d’animaux dangereux, l’importunité des moustiques étant le seul inconvénient à subir ou plutôt à éviter.

On sait les phases douloureuses de l’histoire de Saint-Domingue. Au seizième siècle, les Espagnols ont si bien exploité les mines, qu’ils y ont sacrifié la population indienne des cinq États qui se partageaient l’île à l’arrivée de Colomb, et qu’au dire d’un historien, il n’en restait pas cent cinquante individus à la fin de ce même siècle. Les vainqueurs les remplaçaient, décimés eux-mêmes par les maladies et par leurs propres luttes. En 1586, Drake ravage la colonie encore faible, puis apparaissent les boucaniers, qui, de leur petite île de la Tortue, infestent de temps à autre Haïti et s’y établissent à l’ouest. De là, en 1664, l’occupation de la France, qui vient régulariser la colonie fondée par les enfants perdus de sa civilisation, et qui, en 1697, à la paix de Ryswick, fait sanctionner par l’Espagne son droit de possession.

Cette nouvelle colonie prospéra ; mais, quoique moins cruels que les Espagnols, les Français aussi exploitent durement le pays par l’esclavage. En 1722 a lieu un soulèvement des noirs bientôt réprimé.

Enfin en 1790, le 28 mars, l’Assemblée nationale française décrète que dans ses colonies les mulâtres et les noirs affranchis sont appelés au rang de citoyens et à l’égalité des droits vis-à-vis des blancs. Saint-Domingue alors est profondément troublé ; les colons veulent bien s’affranchir du régime colonial et conquérir leur indépendance administrative, mais ils ne veulent pas faire partager leurs avantages aux hommes de couleur, non plus qu’aux affranchis de la classe noire. Ceux-ci se révoltent, les esclaves se joignent à leur entreprise, et bientôt l’île est en feu.

En 1793, les agents de la France abolirent l’esclavage, et, l’année suivante (1794), la Convention ratifia cet acte. Alors les colons appelèrent à leur secours les Anglais et les Espagnols et s’emparèrent d’une partie du territoire. Mais Toussaint-Louverture, chef noir, le plus énergique peut-être, mais non pas le plus intelligent de la guerre de l’indépendance, chassa les armées étrangères, et finit par se rendre maître de la partie de l’île qu’avait possédée