Page:Boissière - Propos d’un intoxiqué, 1909.djvu/44

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l’ombre : c’est le village annamite aux basses paillotes. Quelques soldats et marins, permissionnaires, ou en bordée illicite, passent en se donnant le bras, puis de bruyantes bandes le matelots servant au commerce. À gauche, miroite et luit sous la lune l’eau frissonnante d’un arroyo, inquiétante et sinistre dans ce grand calme d’un village exotique dont le silence n’est coupé que par un aboiement le chien, un chant d’ivrogne, ou le pas lourd d’un européen isolé.

Dans une ruelle bordée de cai-nhàs annamites, Tous nous arrêtons devant une case basse, à la porte grillée, pareille aux autres cases indigènes. X… frappe ! la cloison extérieure d’une significative manière qui se fait reconnaître pour un habitué du lieu. Un boy méfiant enlève un des bambous de clôture, et nous entrons dans la maison, une cai-nhà annamite fort sale et de chétive apparence, à l’intérieur comme à l’extérieur.

De lourds nuages noirs roulaient dans le ciel depuis le crépuscule. Le tonnerre commence à gronder, avec le formidable trémolo de sa voix de basse, et les larges gouttes de pluie battent vigoureusement la charge sur le toit de chaume. Le rayon bleu rose des éclairs, vibrant comme un jet de phare électrique, épouvante .deux congaïs potelées qui se recroquevillent d’effroi et se collent en frissonnant l’une contre l’autre, sur