Page:Boissière - Propos d’un intoxiqué, 1909.djvu/56

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sur certains tempéraments exceptionnels. Voici ce qui arrive le plus souvent : le premier jour, le fumeur novice ne dépasse guère la ration de deux ou trois pipes ; il fume d’ailleurs sans désir, par curiosité, par insouciance ou par désœuvrement. S’il fréquente un habitué de l’opium, l’occasion de fumer se représente de temps à autre, et bientôt le nombre des pipes devient plus fort et l’intervalle entre les intoxications moins considérable. Peu à peu, le corps s’accoutume au poison ; mais au début, pourquoi vingt-quatre heures après le premier essai l’opium serait-il plus nécessaire qu’après deux ou trois heures, deux jours ou deux semaines ? je sais tel fumeur qui s’adonne à l’opium tous les trois jours, et ne souffre pas dans les intervalles.

M. Bonnetain a très superficiellement étudié la société annamite et chinoise, et les vices spéciaux aux pays d’Extrême-Orient : il a, en consciencieux artiste, fait évoluer dans son œuvre des personnages européens doués de désirs, de vertus, d’habitudes et de passions importés d’Europe ; et il les a encadrés dans quelques paysages exotiques bien compris et bien rendus. Il n’a voulu voir de l’Indochine que ce qu’il en pouvait connaître dans les quelques semaines de son séjour ; aussi a-t-il fait une œuvre bonne — quoiqu’un peu massive — exacte en somme,