Page:Botrel - Chansons de route, 1915.djvu/226

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« Rentrant de patrouill’, l’aurore étant proche,
Je m’ trouv’ nez à nez avec un grand Boche…
J’ fus tell’ment saisi que j’en restai coi :
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

Comm’ je ne suis pas un foudre de guerre
(Oh ! j’ crains pas les coups, mais je n’ les aime guère !)
Je me m’ mis à trembler de crainte et d’effroi :
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

Pour bien lui montrer qu’ j’étais pacifique
J’étendis le poing d’un geste héroïque
Lançant mon « pétoir[1] » à deux mètr’s… ou trois :
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

Voyant s’approcher mon heure dernière
J’ crus r moment venu de fair’ ma prière
En levant aux cieux 1’ bras gauche et 1’ bras droit :
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

Mais l’émotion me donne un’ tranchée :
Avisant un’ sort’ de petit’ « feuillée »
J’ fis, ma foi, c’ qu’on fait dans ce p’tit endroit :
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

Le cœur plus léger, gardant mes airs dignes,
Lui tournant le dos, j’ filai vers nos lignes…
Mais, sur mes talons marchant au pas d’ l’oie,
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi !

« V’là-z-un prisonnier — que je crie — Capitaine !
« Il n’ veut pas m’ lâcher… alors… j’ vous l’amène. »
Puis, je tournai d’ l’œil : y avait-il pas de d’ quoi ?
Le « Kamarad » fit la mêm’ chos’ que moi.

  1. Fusil.