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Page:Bouasse - Pendule spiral diapason, tome 2, 1920.djvu/13

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xiii
DES SAVANTS

Et ceux qui la décernent s’imaginent qu’ils obtiennent un autre résultat que d’avilir eux et la récompense !


Entendons-nous bien. Je raconte l’histoire de Nancy, non pour faire le procès de la Science et de ses méthodes. Je veux seulement vous montrer par un exemple que les savants ne sont pas infaillibles, précisément quand ils oublient les règles les plus élémentaires d’une bonne expérience. Comme je suis las de l’espèce de privilège que réclament les savants de ne jamais se tromper, même quand ils sortent de leur petit truc, je vous rappelle qu’ils se sont très souvent et collectivement trompés même en demeurant dans ce petit truc.

Je construis un a fortiori contre quoi vous n’avez rien à répliquer.

Ils invoquaient les rayons N pour expliquer qu’un écran phosphorescent augmente d’éclat quand on l’approche d’un cœur vivant, alors que tout le monde sait que cette variation peut avoir pour cause une élévation de température, c’est-à-dire alors qu’une hypothèse connue se présentait, par suite devait être systématiquement écartée. Comment ne seraient-ils pas sujets à l’erreur quand il s’agit d’une question complexe d’instruction criminelle ou de stratégie, ou même quand il s’agit de la chose la plus difficile et socialement la plus importante, le choix d’une méthode d’enseignement et l’établissement de programmes judicieux ?

Vous expliquez l’erreur de B. par la mauvaise foi de son garçon de laboratoire ; mais vous ne pouvez expliquer par une colossale machination l’erreur des vingt physiciens on naturalistes qui retrouvaient ses résultats. Vous êtes bien forcé d’admettre que les savants, c’est l’hypothèse la plus favorable, sont aisément suggestionnables, c’est-à-dire souffrent du vice intellectuel qu’on s’attendait le moins à rencontrer chez eux. Que chez le savant la raison soit aussi facilement la dupe du cœur, n’est pas un phénomène indifférent.

Certes vous ne blâmerez pas un homme d’être suggestionnable pas plus que d’être pied bot. Mais vous ne devez pas le croire sur parole quand il prétend qu’en raison de ses travaux, il est au-dessus de ces misères.

Vous me croyez injuste ? Lisez l’enquête de la Revue Rose : vous y trouverez des perles qu’il ne faut pas égarer.

Berthelot croit que les rayons N existent, ayant grande confiance dans les travaux de M. B.

Pour Pellat, M. B. est incapable de s’illusionner ou suggestionner.

Langevin déclare avoir entrepris des expériences dont « M. Mascart désirait la réussite ».

Blondlot avoue qu’on ne peut observer l’influence des rayons N