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Page:Bouasse - Pendule spiral diapason, tome 2, 1920.djvu/15

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xv
DES SAVANTS

entre Pascal et Newton. Dans cette même séance est donnée lecture d’une lettre de Faugère qui, depuis vingt ans, s’occupait de Pascal et lisait ses manuscrits, déclarant que la signature mise au bas des lettres de Pascal n’est pas celle de Pascal, et qu’elles sont d’une autre écriture que la sienne. La comédie a duré quinze jours…

Vous n’y êtes pas : elïe durait encore deux ans après.

On vous a raconté la plaisante histoire de la dent d’or dont je ne sais quelle Académie discutait la croissance ; après quinze ans de débats quelqu’un proposa de vérifier son existence, et l’on constata que jamais personne n’avait possédé dent naturelle de ce métal. Vous avez assurément protesté contre l’invraisemblance de ce conte : et vous aviez grandement tort, l’histoire de Chasles et de l’Académie des Sciences est là pour le démontrer.

Ne m’imputez pas la moindre animosité contre cette Académie. Il est de notoriété que c’est non pas mon défaut de mérite qui m’empêche d’en être, mais simplement mon parfait mépris pour ces associations fermées ridicules, mépris affiché depuis longtemps pour ces cénacles clos d’admiration mutuelle. Je vous raconte cette histoire pour obtenir que l’Académie prise en corps devienne moins néfaste pour le pays. Mais comme vous n’êtes pas tenu de me croire sur parole, je prends dans les Comptes Rendus de l’Acadèmie du 26 août 1867 quelques extraits d’une lettre de Faugère qui valent comme satire les meilleurs morceaux polémiques de Pascal ou de Boileau.

Ce texte a été publié par l’Académie en personne.

« Les documents dont il s’agit étant donnés comme des originaux autographes, et cette qualité supposée étant le principal sinon le seul argument invoqué à l’appui de leur authenticité et de leur valeur, il me semble que la première chose à faire, et la plus essentielle, doit être une vérification d’écriture.

« À cet égard j’ose croire que l’on peut s’en rapporter au témoignage
 de quelqu’un qui a eu pendant quinze mois chez lui le manuscrit des
 Pensées de Pascal et a passé la plus grande partie de ce temps à le
 déchiffrer et à l’étudier.

« À défaut de ce manuscrit, que chacun d’ailleurs peut consulter à la 
Bibliothèque impériale, j’ai mis sous les yeux des Membres de la Com
mission divers fragments également authentiques du grand écrivain, et
 particulièrement une signature mise en bas d’une quittance passée 
devant notaire. Je regrette que pressés par l’heure qui les appelait à 
la séance publique, ou ne se jugeant pas compétents pour une com
paraison d’écriture, ils n’aient pas accordé au fait matériel, qui leur 
était soumis, toute l’attention qu’il comportait.

Ainsi, vous le voyez, on nomme une Commission qui est incompétente ou dont le seul désir est de ne rien savoir. Car vraiment, à juger par l’importance des séances de l’Académie, on peut sans grand