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En outre des colonies agricoles, des secours à domicile et des travaux d’ensemble, chaque ville pourrait avoir à son compte une série d’ateliers, une manufacture, une maison de fabrication, une exploitation quelconque où l’on procurerait de l’ouvrage à tous ceux qui n’en trouveraient pas ailleurs ; et ceci est d’obligation stricte, le bon sens le dit comme l’équité. Si la loi défend de vivre sans travailler, il faut bien qu’on puisse toujours vivre en travaillant, sinon la loi serait absurde. Que chacun puisse donc s’occuper utilement dès qu’il en a le besoin ou la volonté. Qu’il trouve du travail tous les jours, à tout instant. Qu’il y ait à cet effet un bureau ouvert où tout homme, en déclarant ce qu’il sait faire, ce que peut faire sa famille, obtienne immédiatement l’emploi de ses bras.

Le prix de la journée ou de chaque œuvre, fixé par des experts, appartiendrait à l’établissement. Quelque médiocre que soit un produit, il a son prix, et cette valeur serait pour la cité, l’État et la masse, un bénéfice, parce que l’État ou les citoyens, nous en avons dit la cause, nourrissent de fait la pauvreté oisive.

Une considération qui doit aussi déterminer l’adoption de ces ateliers ou de ces moyens de travail, c’est qu’ils retiendraient dans les villes les pauvres qui y ont leur domicile, et débarrasseraient les campagnes de ces troupes de vagabonds, tourbe menaçante qui impose l’aumône plutôt qu’elle ne la demande. Avec la paix et la sécurité, vous ramènerez ainsi aux champs les propriétaires campagnards ; et l’agriculture y gagnera comme l’industrie.

Si les villes ne voulaient ou ne pouvaient pas faire seules ces fondations, l’habitant des villages aurait encore profit à y concourir. Il réduirait ainsi à moitié, au quart peut-être, ses dépenses en dons dit volontaires ou autres tributs indirects, qui doublent ses impôts et qui, à la longue, le minent et l’énervent.