Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/128

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Nous continuons à descendre par une route soutenue par des terrasses et en zigzag, qui nous conduit à Teufelsbruck (pont du diable), position célèbre et qu’on admire encore pour sa hardiesse, mais qui pourtant a perdu beaucoup de sa célébrité depuis l’exécution de la nouvelle route, et surtout de nos chemins de fer qui présentent des travaux bien autrement étonnants. Si le Teufelsbruck est l’ouvrage du diable, ceux-ci le sont de Dieu qui a dirigé la main de nos ingénieurs.

Plus loin, on rencontre un autre pont, et une belle chûte formée par la Reuss.

Le démon paraît d’ailleurs avoir joué un grand rôle dans ce pays et en avoir été le marquis de Carabas, car le pont seul ne porte pas son nom : il y a aussi le Teufelsberg (montagne du diable) ; et plus loin, avant d’entrer dans la vallée de Gœschenen, le Teufelstein (rocher du diable).

C’est en traversant ou côtoyant toutes ces diableries que nous arrivons à Wasen, bourg de treize cents habitants, près duquel est le plus dangereux de ces traquenards de l’esprit du mal, le mont Diedenberg, très-sujet aux avalanches.

Nous passons encore un pont. Le diable n’est pour rien dans celui-ci. Il est construit dans toutes les règles de l’art humain, et il n’en est pas plus mal : décidément le démon baisse.

Le chemin nous conduit à Psaffensprung (saut du moine), lieu qu’on nomme ainsi parce qu’un moine qui se sauvait en enlevant une jeune fille le sauta avec sa proie. Il fallait que la demoiselle fût bien légère ou que le moine eût de bons jarrets, car la Reuss, à cette place,