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DEUX DE TROUVÉES

rent dans les hunes, les canonniers se rangèrent près de leurs pièces, la mousqueterie se distribua le long des passe-avants ; les grapins, les piques, les grenades, tout fut disposé en son lieu et place.

Les passagers, sans en excepter l’intrépide comte d’Alcantara, étaient dans une inquiétude facile à imaginer ; Sir Gosford seul conservait son calme et son sang-froid habituel. Quant au capitaine, sa résolution était prise, se battre jusqu’à la mort, et à la dernière extrémité faire sauter le navire. Sa résolution était extrême, mais enfin mieux valait la mort que le déshonneur.

Clarisse Gosford ôtait restée sur le pont, examinant tous ces préparatifs de défense et de destruction. En vain son père lui avait conseillé de descendre et de suivre sa jeune amie dans la cabine. Clarisse avait suivi avec une anxieuse curiosité toutes ces dispositions ordonnées avec calme par le capitaine, et exécutées tranquillement, sans confusion, sans bruit, mais promptement, par les gens de l’équipage, dont la figure impassible et sévère ne trahissait pas le moindre signe de crainte, quoiqu’elle exprimât en même temps la gravité avec laquelle ils considéraient la présente conjoncture.

Le capitaine, qui avait évité de se trouver près de Clarisse, ayant été obligé de se rendre, pour surveiller une manœuvre, sur le gaillard d’arrière, où elle était avec son père, elle alla droit à lui et lui demanda d’un ton ferme :

— M. le capitaine, je sais que nous allons avoir une bataille, vous n’avez pas besoin de me le cacher, je le vois bien ; je n’ai pas peur, ainsi ne craignez pas de me dire la vérité. Croyez-vous que vous ne pourrez éviter l’abordage ?