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Page:Bouglé - Qu’est-ce que la sociologie ?, 1921.djvu/134

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QU’EST CE QUE LA SOCIOLOGIE ?

un bon guide ? Ces deux idées sont-elles vraiment antithétiques ? Ou bien celle-ci ne fait-elle qu’envelopper celle-là ? En un sens, — tous nos auteurs le reconnaîtraient avec Rodbertus, — toute division du travail est encore union de travail. L’expression de division du travail est mal faite si elle nous fait penser à la séparation et à l’isolement des individus : l’essentiel du phénomène, c’est la connexion qu’il établit entre leurs efforts. Mais si l’on entend par union de travail l’accomplissement de différentes sortes d’activité par une même personne, le cumul de fonctions qui est le propre de la femme dans la maison, de l’ouvrier bon à tout faire, du mineur qui est en même temps agriculteur, alors il faut reconnaître que l’union du travail est bien le contraire de la division du travail. Au lieu d’être inférieure, la quantité d’énergie productive dont dispose l’homme est ici supérieure à telle besogne particulière ; il assume donc plusieurs besognes afin d’occuper tout son temps et d’employer toutes ses forces. Or la division du travail ne commence, à proprement parler, que là où les activités se distribuent entre plusieurs mains.

Mais dirons-nous qu’il suffit, pour qu’apparaisse la division du travail, qu’il y ait aide mutuelle et addition des efforts ? Des hommes s’assemblent pour pousser une poutre ou pour faucher un champ. Leurs efforts s’ajoutent, mais on ne peut pas dire qu’ils soient ajustés, précisément parce qu’ils ne sont pas différents. Ils collaborent, mais leur coopération est simple : c’est une communauté de travail. Il faut à la division du travail une coopération complexe, où les tâches des différents coopérateurs soient différentes. Il importe, pour que nous la reconnaissions, non seulement que le service