Page:Boulenger - Romans de la table ronde I.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
170
MERLIN L’ENCHANTEUR

sacres ; mais, grâce aux chevaliers de la Table ronde et à Merlin qui portait le dragon flamboyant au milieu de la mêlée, on vit plus de païens tués que de chrétiens.

Alors le roi Rion cueillit un rameau de sycomore et, le tenant à bout de bras, galopa entre les deux armées pour les séparer ; puis il cria si haut que tout le monde l’entendit :

— Roi Artus, pourquoi soufrons-nous que ta gent et la mienne se détruisent ? Faisons reculer nos deux armées et combattons-nous : le vaincu se proclamera le vassal du vainqueur, et lui donnera sa barbe avec le cuir.

Artus ayant accepté, les deux rois prirent du champ, et se jetèrent l’un sur l’autre comme tempêtes. Leurs lances rompues, ils saisirent leurs épées, dont ils se déchargèrent de tels coups que bientôt ils eurent rompu les cercles de leurs heaumes et éparpillé les fleurons qui les ornaient, ainsi que les gemmes dont certaines pourtant avaient de grandes vertus. Le roi Rion était bon chevalier ; mais Artus lui tua son destrier, de façon qu’il chut à terre, et il reçut au moment qu’il se relevait un grand coup sur la tête, qui le fit chanceler et retomber tout de son long en mugissant comme un taureau. Aussitôt Artus sauta de son cheval, courut à lui, lui arracha son heaume d’une seule main, si rudement qu’il en rompit les lacets, et lui coupa le cou.

Ainsi périt le roi Rion.