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CLAUDAS DE LA TERRE DÉSERTE

haute taille, le visage large et foncé, les sourcils velus, les yeux noirs et écartés, le nez court, retroussé, la barbe et les cheveux mi noirs, mi roux, le cou gros, la bouche grande, les dents blanches et coupantes, d’ailleurs aussi bien fait des épaules, des pieds et de tout le corps qu’on pouvait le souhaiter.

Il se levait et mangeait de grand matin, ne jouait guère aux échecs, aux tables et autres jeux de prud’hommes, mais il aimait d’aller à la chasse et de voler en rivière, au faucon plutôt qu’à l’autour. Il partait ainsi pour chasser deux ou trois jours, toujours à l’improviste. Il ne chevauchait guère que sur de grands chevaux de bataille, même en voyage, ou tout au moins faisait-il mener un destrier auprès de lui, aussi bien en paix qu’en guerre. Son caractère était ensemble bon et mauvais. Ce qu’il préférait, c’était un prud’homme qui fut pauvre : jamais il ne crut qu’un riche pût être prud’homme. Il détestait ceux qui avaient plus de puissance que lui et n’aimait que ses inférieurs. Il allait volontiers à l’église, mais ne faisait aux indigents que de petites aumônes. Et il ne fut jamais amoureux qu’une fois dans sa vie :

— C’est, disait-il, que le cœur d’un chevalier qui aime désire sans cesse de surpasser tout le monde, mais nul corps, pour valeureux qu’il soit, ne pourrait accomplir sans mourir les rêves du cœur. Certes, si la force du corps était ca-