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MERLIN L’ENCHANTEUR

pable de réaliser ce que souhaite le cœur, j’aimerais d’amour toute ma vie, et je passerais en prouesse tous les prud’hommes. Car je sais bien que nul ne peut être tout à fait preux s’il n’aime très loyalement, et je me connais assez pour savoir que j’aimerais plus loyalement que tous les amoureux.

Ainsi parlait Claudas dans le privé, et il disait vrai car, au temps de ses amours, il avait été loué en maintes terres pour sa chevalerie. Mais le conte laisse ici de parler de lui et récite ce qui advint du petit Lancelot.


VII


La demoiselle qui l’avait emporté était fée. En ce temps-là, on appelait fées toutes les femmes qui s’entendaient aux enchantements, et il y en avait plus en Bretagne qu’en toute autre terre. Elles savaient la vertu des paroles, des pierres et des herbes, et par là elles se maintenaient en jeunesse, beauté et richesse à leur volonté. Et tout cela fut établi au temps de Merlin, le prophète aux Anglais, qui eut toute science, et qui fut tant honoré et redouté des Bretons qu’ils l’appelaient leur saint prophète, et la menue gent disait même dieu.