Page:Boulenger - Romans de la table ronde I.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
11
LE NOURRISSON BIEN DISANT

— Non, car vous savez bien que votre fils est né d’un prêtre, à telles enseignes que la première fois que vous vous unîtes à celui-ci, vous lui dîtes que vous craigniez beaucoup d’être engrossée, parce que votre mari était loin de vous à cette époque. Est-ce vrai ?

— Beau fils, dit la dame, vas-tu croire ce que raconte ce diable ?

— Si cela ne suffit pas, reprit l’enfant, je vous dirai encore ceci. Lorsque vous vous sentîtes grosse, le prêtre courut le pays à la recherche de votre époux et fit tant et si bien qu’il le décida à coucher avec vous. Grâce à quoi votre seigneur ne douta point que l’enfant ne fut de son sang.

En entendant cela, la dame fut si troublée qu’elle dut s’asseoir. Son fils alors la regarda :

— Quel que soit mon père, lui dit-il, je suis votre fils et vous traiterai comme tel. Avouez donc la vérité.

— Pour Dieu, beau fils, grâce ! Je ne le puis celer : il en a été comme cet enfant dit.

— Il avait donc raison de prétendre qu’il savait mieux quel était son père que moi quel était le mien, et il ne serait pas juste que je condamnasse sa mère quand je ne condamne pas la mienne. Mais, dit le juge à Merlin, au nom de Dieu et pour ton honneur, et afin que je puisse disculper devant le peuple celle dont tu es né, déclare-moi qui t’a engendré.