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ARTUS ÉLU ROI

mêmes ce que valait chacun ; pourtant il commanda à Artus de replacer l’épée dans l’enclume, puis il dit aux mécontents de recommencer l’épreuve. Et tous essayèrent une fois de plus, mais nul ne réussit.

— Ils sont bien fous ceux qui vont contre la volonté de Dieu ! s’écria le prélat.

— Sire, dirent les barons, nous n’allons point contre sa volonté, mais il nous est trop grande merveille qu’un homme de si basse condition devienne ainsi notre seigneur. Nous vous demandons que vous laissiez l’épée au perron jusqu’à la Chandeleur.

L’archevêque y consentit ; mais, ce jour-là encore, nul d’entre eux ne put l’arracher.

— Allez, beau fils Artus, dit alors l’archevêque : si Notre Sire veut que vous gouverniez ce peuple, baillez-moi ce glaive.

Aussitôt Artus se leva et tira l’épée sans plus d’efforts que si elle eût été enfoncée dans une motte de beurre. Le peuple pleurait de joie et de pitié ; mais les barons réclamèrent qu’on recommençât l’épreuve à Pâques. Quand Pâques furent venues, il en alla tout de même. Alors ils se résignèrent à reconnaître le fils d’Antor pour l’élu de Dieu ; pourtant ils exigèrent encore que son sacre fut reculé jusqu’à la Pentecôte. Ce jour-là, Artus s’agenouilla une dernière fois devant le perron, puis il prit l’épée dans ses mains jointes et la leva très facilement.