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MERLIN L’ENCHANTEUR

senestre, si vivement qu’il semble entouré d’éclairs, et à faire de si grandes prouesses que nul n’ose l’attendre et que tous l’évitent. Voyant cela, six des rois s’accordent pour le charger ensemble, et ils le renversent avec son cheval. Mais Keu, Bretel, Antor, Ulfin et leur lignage accourent à la rescousse ; Keu se jette sur le roi Lot, lui décharge un tel coup sur son heaume qu’il l’abat sur l’arçon, le frappe, le refrappe, s’acharne et le fait tomber à bas de son destrier, tout étourdi.

À ce moment, la foule du menu peuple se précipitait à son tour dans la mêlée, armée de haches, de masses, de bâtons, si bien que l’ennemi commença de plier sous le nombre et de fuir. Fort échauffé, Artus, remonté par les siens, se jette à la poursuite, et fait merveille d’Escalibor au point que sur ses armes rouges de sang on ne voit plus couleur ni vernis. Semblable à une statue vermeille, il atteint le roi Ydier ; déjà il hausse l’épée pour le férir sur son heaume, mais son cheval l’emporte plus loin qu’il n’aurait fallu, si bien que le coup, frôlant l’homme, tombe sur le destrier et lui tranche le cou. Ydier tombe à terre ; ses gens le dégagent, le remontent à grand’peine… Enfin les onze rois s’échappent, rudement pourchassés, laissant sur le terrain tout leur bagage et leur vaisselle d’or et d’argent.