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LES SAINES

Et Guerrehès a parlé en prud’homme, quand il a déclaré qu’il n’attendrait rien que d’amour et courtoisie ; ainsi ferais-je pour ma part.

— Dieu m’aide ! dit Agravain, il n’en coûterait pourtant à la demoiselle ni un membre, ni la vie.

— Non, mais l’honneur, dit Gauvain.

— Je ne donnerais pas un bouton d’un homme qui respecte une femme, dès qu’il la tient seul à seule : s’il la laisse aller, il n’en sera jamais aimé, et l’on ne fera que se moquer de lui, sans qu’il en soit plus prisé.

Comme ils devisaient ainsi, ils aperçurent au loin des fumées et un grand nuage de poussière, et bientôt ils rencontrèrent des paysans qui s’enfuyaient effrayés.

— C’est un parti de Saines, dirent les vilains. Ils emmènent des chevaliers prisonniers, les pieds liés sous le ventre de leurs propres chevaux, en les battant cruellement à coups de bâtons, et ils escortent un convoi de sommiers et de charrettes qui portent des vivres et du butin. Ils boutent le feu aux villages et tuent tout ce qu’ils rencontrent.

— Mais où est le roi Artus ? demandèrent les enfants.

— Il est parti pour le royaume de Carmélide depuis la mi-carême, après avoir bien garni les marches et les forteresses de sa terre.

— Aux armes, francs écuyers ! crièrent les