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BATAILLE DE CAROHAISE

mettent à frapper comme charpentiers sur poutres.

Ponce Antoine, qui était un des plus preux chevaliers du monde, ne put souffrir de les voir ainsi travailler : il rassembla ses meilleurs hommes et chargea avec eux au milieu de la mêlée. À nouveau les chevaliers de Cléodalis plièrent et déjà plusieurs des compagnons de Merlin étaient renversés. Mais le roi Artus jura de s’essayer au Romain qui bataillait de la sorte. Il fut prendre de ses écuyers une nouvelle lance, roide, à fer tranchant, et revint au galop.

— Sire, lui cria le roi Ban, que voulez-vous faire ? Vous êtes trop jeune et trop petit pour jouter contre un si grand diable. Laissez-moi aller, qui suis votre aîné, et plus fort, et plus haut.

— Je ne saurais jamais ce que je vaux, repartit le roi, si je ne m’essayais contre un chacun.

Et il pique des deux si rudement que le sang sort des flancs de son destrier ; sous les fers du cheval le sol résonne et les pierres volent comme grêle. Le Romain s’adresse à sa rencontre ; mais Artus lui transperce l’écu, le haubert et le corps, de manière que le fer et une brasse au moins du bois de sa lance passent outre l’échine : et Ponce Antoine tombe mort. Alors le roi tire sa bonne épée Escalibor dont il fait merveilles, coupant, bras, poings et têtes. Ah ! le beau damoisel ! À le voir, la fille du roi