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MERLIN L’ENCHANTEUR

fille Guenièvre vint elle-même, vêtue des plus riches habits qu’elle eut, présenter aux trois rois l’eau chaude dans un bassin d’argent. Elle leur lava de sa main le visage et le cou, et les essuya très doucement d’une serviette blanche et bien ouvrée ; puis elle leur mit à chacun un manteau au col ; et, quand elle vit ainsi le roi Artus, elle pensa que la dame qu’un si beau et si bon chevalier requerrait d’amour serait heureuse. Et lui, de son côté, il la regardait très tendrement, car elle était la plus belle femme qui fût alors en la Bretagne bleue : sous sa couronne d’or et de pierreries, son visage était frais et justement coloré de blanc et de vermeil ; quant à son corps, il n’était ni trop gras ni trop maigre, les épaules droites et polies, les flancs étroits, les hanches basses, les pieds blancs et voûtés, les bras longs et gros, les mains blanches et grassettes : c’était une joie. Mais, si en elle était la beauté, davantage encore s’y trouvaient bonté, largesse, courtoisie, sens, valeur, douceur et débonnaireté.

Quand le manger fut prêt, on mit les tables et les chevaliers prirent place. Le roi Bohor et le roi Ban firent asseoir le roi Artus entre eux, par honneur, et Léodagan remarqua cela. « Ce doit être leur seigneur, pensa-t-il. Plût à Dieu qu’il épousât ma fille ! Car tant de chevalerie ne saurait se trouver qu’en un haut homme. »

Cependant Guenièvre offrait le vin à Artus dans