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Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/188

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CHATEAUBRIAND



I


« On n’est plus assez juste pour Chateaubriand tant vanté naguère ! » écrivait un jour avec toute raison notre excellent confrère et ami Léon Gautier. Le temps est loin, hélas ! où un poète républicain adressait à l’auteur du Génie du Christianisme cette épître qui n’est pas assurément l’une des pièces les moins remarquables de la Némesis :

    … Aussi quand tu parus dans ton vol triomphant,
    Fils du Nord, le Midi t’adopta pour enfant.
    Oh ! Dieu t’avait créé pour les sublimes sphères,
    Où meurt le bruit lointain des mondaines affaires ;
    Il te mit dans les airs où ton vol s’abîma
    Comme le grand condor que vénère Lima :
    Oiseau géant, il fuit notre terre profane,
    Dans l’océan de l’air il se maintient en panne ;
    Là, du lourd quadrupède il contemple l’abri,
    L’aigle qui passe en bas lui semble un colibri,
    Et noyé dans l’azur comme une tache ronde,
    On dirait qu’immobile il voit tourner le monde.
    C’était là ton domaine alors, que revenant
    Des huttes du Sachem sur le vieux continent,
    Tu t’élevas si haut d’un seul bond que l’Empire
    Un instant s’arrêta pour écouter ta lyre.