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Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/346

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Rien de plus dans le récit du docteur. Mais grâce à Dieu, d’après les témoignages les plus authentiques, la mort de Dupuytren n’eut point ce caractère froidement stoïque, sceptique, et les plus précieuses des consolations ne manquèrent pas à son agonie. Écoutons encore le grand orateur.

« Enfin, cet homme illustre, le docteur Dupuytren, se trouva lui-même sur son lit de mort, et du regard dont il avait jugé le péril de tant d’autres, il connut le sien. Cette heure le trouva ferme ; il avait eut trop de gloire pour regretter la terre et se méprendre sur son néant. Mais la révélation du peu qu’est la vie ne suffit pas pour éclairer l’âme sur sa destinée, et peut-être est-elle le plus grave péril de l’orgueil aux prises avec la mort. Il faut, à ce moment suprême, reconnaître également la misère et la grandeur de l’homme, et si le génie peut de lui-même s’élever jusqu’à sentir sa misère, il ne peut pas en même temps sentir sa grandeur. Ce double secret ne s’unit et ne se manifeste à la fois que dans une clarté qui vient de plus haut que la gloire. Dupuytren la vit venir. En roulant dans les replis de sa mémoire le spectacle des choses auxquelles il avait assisté, parmi tant de figures qui s’abaissaient sous son dernier regard, il en était une qui grandissait toujours, et dont la simplicité pleine de grâce lui rappelait des sentiments qu’il n’avait éprouvés que par elle. Le vieux curé de campagne était demeuré présent à son âme, et il en recevait, dans ce vestibule étroit de la mort, une constante et douce apparition. Messieurs, je ne vous dirai pas le reste : Dupuytren touchait aux abîmes de la vérité, et pour y descendre vivant, il n’avait plus qu’à tomber dans les bras