Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/263

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qu’elles viennent, elles ou d’autres… » insista-t-il sur un ton si énervé, si troublé, si peu en rapport avec son offre de fête galante, que j’entrevis ou crus entrevoir derrière ce programme d’amusement voulu et calculé un drame secret, une passion peut-être à oublier. — Une passion ? Mais pour qui ? Charles n’allait pas dans le monde. Sa démarche même auprès de moi révélait toute sa naïveté : il ne fréquentait aucun des rendez-vous de plaisir où un garçon de son âge aurait pu rencontrer des yeux et des sourires auxquels se prendre. Un instinct m’avertit que, s’il y avait quelque femme dans la vie du musicien philologue, ce ne pouvait être que cette Mme Mitford, la mystérieuse Anglaise dans l’intimité de laquelle un mari trop confiant lui permettait de vivre, et qu’il ne me faisait jamais connaître, tout en m’en parlant sans cesse. Et, vite, un roman se dessina dans mon imagination, ou plutôt plusieurs possibilités de roman : Charles se laissant aller à la séduction de la jeune femme, et le lui déclarant un jour ; celle-ci indignée et le consignant à la porte, — premier scénario. Celle-ci touchée de cet amour et