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la terreur en macédoine

Pendant ce temps, il a chargé son fusil. Passer le canon par une meurtrière et faire feu sans même viser est l’affaire de trois secondes.

Il n’entend pas la détonation et ne sent pas à l’épaule ce recul violent bien connu des tireurs.

« Ratée ! » dit-il tout colère.

Vivement, il fait sauter la mauvaise cartouche, la remplace par une autre, épaule et tire.

Il perçoit distinctement le choc du percuteur sur l’amorce de la cartouche… tac ! et frémit jusqu’aux moelles.

« Ratée encore ! »

En même temps le feu, très violent, se ralentit. À mesure que sont brûlées les anciennes cartouches, les détonations se font de plus en plus rares.

Des cris de stupeur et de colère s’élèvent et se croisent.

« Mille tonnerres ! toutes ces cartouches ratent… Malédiction ! nous sommes désarmés !… ratée encore… oh ! c’est à devenir fou !…

« Sang Dieu ! l’ennemi qui arrive ! »

Au milieu de ces imprécations, on entend les percuteurs claquer sur la base des cartouches… tac !… tac !… tac !… tac !…

Pas une détonation… plus rien qu’un silence fait de consternation et de rage. Les martinis, si meurtriers, ne sont plus que d’inoffensifs tubes de fer !

« Baïonnette au canon ! » rugit, exaspéré, Joannès.

Stupéfaits et ravis, bien que flairant peut-être un piège, les Turcs poussent des hurlements sauvages et s’avancent, en rangs compacts sur le pont qui oscille, fléchit, mais tient bon.

Côte à côte avec Joannès, le pope se trouve en tête