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la terreur en macédoine

de Marko. Et Marko, sûr de sa vigueur, saisit aux flancs le jeune homme pour le terrasser.

La force de l’Albanais est légendaire et rien ne lui résiste. Culbuter un buffle furieux en l’empoignant par les cornes est pour lui un jeu. On l’a vu dompter un cheval à demi sauvage par la pression de ses genoux, le faire hennir de douleur, et finalement le contraindre à plier les jambes.

D’un coup qui lui est familier, il essaye de rompre les reins de Joannès, qu’il domine d’ailleurs de toute la tête.

Chose étrange, le Slave résiste comme un bloc. Bien plus, il ceinture si vigoureusement de ses deux bras le brigand, que ce dernier perd pied, suffoque, bleuit. Furieux, il grogne :

« Par les tripes du Prophète… je t’arracherai les yeux.

— Et moi, riposte Joannès, je ferai manger ton cœur… aux pourceaux… ils crèveront empoisonnés.

— Chien de chrétien !…

— Fils de truie ! »

Collés l’un à l’autre, hérissés, crispés, s’étreignant à faire craquer leurs os, ils sont d’égale force. Serré de près, voyant que les paysans décimés ne reculent pas, se font sans doute écharper, mais rendent coup pour coup, Marko veut en finir.

Il lance de nouveau son appel strangulé, métallique :

« Hadj !… à moi… Hadj !… »

Le léopard entend la voix, comprend l’appel. Fouillant férocement les corps des dents et des griffes, il quitte à regret le carnage et arrive d’un bond.

Il aperçoit l’homme qui lutte contre son maître, et