Page:Boutroux - Études d’histoire de la philosophie.djvu/218

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geschrieben nach goettlicher Erleuchtung, « écrit en vertu d’une illumination divine ».

L’œuvre répond aux conditions dans lesquelles elle a été composée. C’est un mélange confus de théologie abstruse, d’alchimie, de spéculations sur l’insaisissable et l’incompréhensible, de poésie fantastique et d’effusions mystiques : c’est un chaos étincelant. Le premier ouvrage composé par Boehme s’appelle : « L’aurore à son lever, ou la racine et la mère de la philosophie, de l’astrologie et de la théologie considérées dans leur véritable principe description de la nature, où l’on voit comment toutes choses ont été à l’origine, etc. », etc. Boehme y expose la genèse de la sainte Trinité, la création et la chute des Anges, la création et la chute de l’homme, la rédemption et les fins dernières du monde. Il voit et veut faire voir, bien plus qu’il ne démontre : sa science est une hallucination métaphysique. Aussi fait-il constamment violence à la langue ; il lui demande d’exprimer l’inexprimable. Les termes de l’ancienne mystique, de l’alchimie, de la philosophie sont mis par lui à contribution ; il leur impose des sens d’une subtilité inouïe, il veut qu’au fond de toute pensée il y ait de l’infini et du mystérieux. Est-il possible qu’en une telle œuvre il y ait matière à récolter pour l’historien de la philosophie, à moins que, par une interprétation arbitraire, il ne transforme en concepts ce qui, chez l’auteur, est pure intuition et imagination ?

Il serait malséant, pour juger cet homme qui ne